Le Voyageur Nocturne

 Le Voyageur Nocturne

 

Lumière céleste et mystère cosmique

 

Le Coran, Parole d’Allah interpelle souvent l’homme à travers les signes visibles de la nature et de l’univers. Ces signes ont un double langage spirituel et scientifique. La Sourate At-Tāriq ouvre avec un serment céleste d’une grande intensité. Allah jure par le ciel et par une étoile mystérieuse appelée "At-Tāriq", qu’on peut traduire par "l’astre frappant" ou "le visiteur nocturne". Le style est solennel et l’attention est immédiatement captée par la répétition et l’interrogation divine 

 

"Par le ciel et par le visiteur nocturne ! Et qui te dira ce qu'est le visiteur nocturne ? C’est l’étoile perçante (ou fulgurante) !"

(Sourate 86, versets 1 à 3)

 

Tafsîr des savants musulmans

1. Al-Tāriq (الطارق) :

Le mot vient de la racine "ṭaraqa" qui signifie "frapper" ou "arriver de nuit".

Ibn Kathîr explique que c’est une étoile apparaissant la nuit, car les Arabes appellent tout ce qui survient la nuit un "ṭāriq".

Il précise que cela désigne une étoile brillante qui "frappe" le regard dans l’obscurité.

 

2. Al-najm al-thāqib (النجم الثاقب) :

Traduction littérale : "l’étoile perçante".

Selon Tafsîr Al-Qurtubî, cela peut désigner une étoile extrêmement lumineuse, qui transperce l’obscurité du ciel.

Al-Rāzī y voit une allusion à une étoile rare, exceptionnelle par sa puissance ou son comportement.

 

3. Al-Shawkānî et d’autres commentateurs disent qu’Allah attire l’attention de l’homme sur un phénomène impressionnant du ciel, comme pour éveiller la foi à travers la contemplation des merveilles de l’univers.

 

Approche scientifique contemporaine

Les exégètes classiques ne pouvaient évidemment pas connaître les données astronomiques modernes. Mais les savants contemporains musulmans ont tenté d’établir des correspondances possibles entre ces termes et des phénomènes célestes réels, découverts bien après l’époque de la révélation.

 

Interprétations scientifiques possibles de "At-Tāriq" :

1. L’étoile à neutrons ou pulsar :

Ce sont les restes ultra-denses d’étoiles massives qui ont explosé en supernova.

Elles émettent des pulsations électromagnétiques régulières, souvent détectées comme des "battements" radio depuis la Terre, comme un martèlement céleste.

Leurs rayons sont extrêmement puissants, comme une lumière perçante dans l’univers sombre.

2. Le trou noir (black hole) :

Certains chercheurs musulmans ont proposé que "al-najm al-thāqib" pourrait désigner un trou noir, qui "transperce" la matière et la lumière autour de lui par sa force gravitationnelle.

Bien que les trous noirs ne soient pas lumineux, les jets de matière et rayons X qu’ils émettent peuvent être perçus comme "perçants".

 

3. Une étoile supergéante comme Sirius ou une nova :

Certaines étoiles sont visibles la nuit avec une intensité extraordinaire, comme Sirius (ash-Shiʿrā), déjà connue des anciens Arabes, parfois identifiée dans la Sourate 53.

Une nova est une explosion soudaine d’étoile qui devient visible pendant un court moment, frappant le ciel nocturne d’une lumière vive.

 

Harmonie entre le Texte et la Création

Ces versets illustrent à merveille la convergence entre le "Livre révélé" (le Coran) et le "Livre de la création" (l’univers). Le style coranique évoque avec précision des phénomènes cosmiques que l’homme n’a découverts que récemment grâce à des télescopes avancés, des satellites et la radioastronomie.

 

Le fait que le Coran parle d’une étoile perçante, qui frappe, arrive de nuit et interpelle l’esprit, correspond étrangement aux caractéristiques modernes de certains astres comme les pulsars, qui :

• Ne sont visibles que par leurs impulsions (comme un battement) ;

• Sont extrêmement denses ;

• Sont souvent découverts dans le silence de l’espace profond ;

• Transpercent l’obscurité par leurs signaux.

 

Leçons spirituelles à en tirer

1. L’appel à la réflexion : Ces versets nous poussent à observer le ciel, à méditer la création d’Allah et à reconnaître Sa toute-puissance.

2. Le mystère de l’univers : Même avec toute notre technologie, le ciel garde des secrets. Cette sourate nous enseigne l’humilité devant l’immensité divine.

3. Le rappel du jugement : La suite de la sourate relie ce phénomène céleste au destin de l’homme, rappelant que Celui qui a créé et ordonné l’univers connaît tout et rendra compte de tout.

 

La sourate At-Tāriq, à travers ses trois premiers versets, combine puissance poétique, profondeur spirituelle et richesse cosmologique. Elle interpelle autant le cœur que l’intellect :

« Et qui te dira ce qu’est le visiteur nocturne ? »

C’est une invitation divine à ne pas ignorer les signes du ciel, à comprendre que l’univers n’est pas muet, mais qu’il parle de Dieu, qu’il témoigne de Sa grandeur, pour qu’en le contemplant, l’homme se rappelle de son Créateur.

 

Découverte de l’étoile à neutrons / pulsar ou "At-Tāriq" céleste ?

Date de la découverte :

1967 – découverte du premier pulsar, manifestation observable d’une étoile à neutrons.

 

Scientifiques impliqués :

1. Jocelyn Bell Burnell (née en 1943) – astrophysicienne britannique

• Était alors doctorante à l’université de Cambridge.

• Travaillait sous la direction de Anthony Hewish, qui recevra plus tard le prix Nobel (mais elle, non, ce qui créera une vive polémique...).

 

Circonstances de la découverte :

• Jocelyn Bell observait le ciel radio avec un radiotélescope très sensible conçu pour détecter des quasars.

• Elle remarqua un signal régulier, émis toutes les 1,337 secondes, venant d’un même point du ciel.

• Au début, ils appelèrent le signal LGM-1 (pour "Little Green Men" = "petits hommes verts") car la régularité paraissait artificielle, presque comme un message extraterrestre !

Ce qu’ils avaient découvert en réalité :

• C’était une étoile à neutrons tournant très rapidement sur elle-même, émettant des pulsations électromagnétiques à chaque tour, à la manière d’un phare.

• Cette étoile a été baptisée pulsar (contraction de pulsatingstar).

 

Concept théorique avant la découverte (1933)

Avant qu’on ne l’observe en 1967, l’idée d’une étoile à neutrons avait déjà été théorisée.

En 1933 :

• Les physiciens Walter Baade et Fritz Zwicky (Caltech, USA) proposent que :

"Lorsque les étoiles massives explosent en supernova, leur cœur peut s’effondrer en un noyau ultra-dense composé uniquement de neutrons."

Ils suggèrent que ce noyau pourrait devenir ce qu’on appellera plus tard une étoile à neutrons.

 

 

Conséquences scientifiques

• La découverte des pulsars a permis de confirmer l’existence des étoiles à neutrons théorisées plus de 30 ans avant.

• Les pulsars sont devenus des outils cosmiques pour mesurer le temps, étudier la relativité générale, les ondes gravitationnelles, etc.

• Ils sont très denses : une cuillère à café de matière d’étoile à neutrons pèse plusieurs milliards de tonnes !

 

Lien avec le verset coranique "الطارق النجم الثاقب"

• Le mot "ṭāriq" peut désigner un visiteur nocturne soudain.

• Et "al-najm al-thāqib" : une étoile qui "perce" les ténèbres.

• Or, le pulsar correspond parfaitement à cette description :

o Il est invisible le jour, mais perce le ciel nocturne avec ses pulsations puissantes.

o Son signal traverse l’espace et "frappe" la Terre de manière régulière.